Brexit : quels effets collatéraux pour les entreprises françaises ?
L’accord de libre échange négocié in extremis fin 2020 marque la fin de la période de transition post Brexit entre l’Union Européenne et le Royaume-Uni. Depuis le 1er janvier 2021, le droit de l’Union européenne ne s‘applique donc plus pour les échanges outre-Manche. Si le désastre parfois redouté de rupture complète de la supply chain a été évité, ce nouvel accord est synonyme de formalités douanières et d’éventuels casse-tête administratifs. Voici les règles à suivre pour continuer à commercer avec le Royaume-Uni.
L’accord du Brexit, un mal pour un bien
Certes, l’accord de commerce et de coopération n’offre pas la même liberté d’échanges qu’au temps où le Royaume-Uni faisait partie intégrante de l’Union Européenne et du marché commun. Malgré tout, il va bien au-delà d’un accord « classique » de libre-échange et permet de continuer de commercer outre-Manche de manière relativement avantageuse. À ce titre, plusieurs éléments essentiels de cet accord sont à retenir :¹
- L’absence de tarifs douaniers : l’accord ne prévoit pas de tarifs douaniers et de contingents supplémentaires, et ce, sur toutes les marchandises. Une bonne nouvelle car, sans cela, certains produits auraient été touchés par des droits de douane supérieurs de plus de 40 % aux droits de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC).
- Le respect des « règles d’origine » : pour s’éviter des droits de douane, les entreprises doivent prouver l’origine de leurs produits. Cette démarche reste néanmoins simplifiée car la certification d’origine peut être apportée par les professionnels eux-mêmes.
- Des procédures douanières simplifiées : les contrôles douaniers s’appliquent désormais à toutes les marchandises échangées, qui doivent être systématiquement déclarées avant leur entrée sur le sol européen. Malgré tout, les formalités à réaliser restent relativement légères, notamment grâce à l’usage de documents douaniers à code-barres.
Le Royaume-Uni : 6e client de la France
D’un point de vue commercial, le Brexit est loin d’être anodin puisque le Royaume-Uni est l’un des principaux partenaires commerciaux de la France. L’Hexagone a importé pour 21,1 milliards d’euros et exporté pour 33,6 milliards d’euros avec le Royaume-Uni en 2019. Des chiffres qui font de notre voisin britannique notre 6e client et notre 7e fournisseur.²
Importation et exportation : des contrôles limités
En ce qui concerne les exportations, vous êtes exempté de droits de douane sur l’ensemble des produits, à condition d’effectuer systématiquement une déclaration en douane, mentionnant l’origine des produits.³
À l’importation, vous devez déposer une déclaration sommaire d’entrée (ENS), et ce, au sein du système informatique ICS (Import Control System) français. Tous les transports sont concernés par cette obligation, à l’exception :
- des envois postaux ;
- des véhicules roulant à vide ;
- des bagages personnels des voyageurs ;
- des emballages vides non couverts par un contrat de transport4.
À l’importation comme à l’exportation, vos chauffeurs devront se munir de plusieurs documents, dont la nature dépend du convoi :
- pour la plupart des marchandises, le chauffeur devra présenter son permis de conduire, les papiers du véhicule, la lettre de voiture CMR (contrat de transport international de marchandises par route) et le numéro MRN (numéro de référence maître), mentionné dans un document à code-barres obtenu suite à la déclaration en douane ;
- pour les produits sanitaires et phytosanitaires, un contrôle des documents est systématique, tandis qu’un contrôle physique de la marchandise pourra être réalisé au cas par cas ;
- pour les produits issus de la pêche, une autorisation spécifique est nécessaire et vous pourrez aussi faire l’objet d’un contrôle ;
- pour un transport à vide, seuls le permis et les papiers du véhicule sont nécessaires 5.
Un cadre qui reste à définir pour la protection des données
Comme l’a souligné la CNIL, le RGPD (Règlement européen pour la protection des données personnelles) reste applicable sur toutes les données transmises vers le Royaume-Uni, et ce, jusqu’au 1er juillet 2021. Autrement dit, les règles que vous suivez actuellement restent inchangées durant cette période de transition et vous n’avez donc pas davantage de formalités à accomplir en la matière. D’ici là, le futur cadre doit être défini. Toutefois, si la Commission européenne n’autorise pas un transfert général des données personnelles, toutes vos communications seront considérées comme étant un transfert de données vers un pays tiers. Dans cette hypothèse, de nouvelles démarches seront donc à entreprendre (nouvelles clauses contractuelles, etc.).6
En revanche, le guichet unique n’est plus applicable au Royaume-Uni depuis le 1er janvier 2021. Simplifiant les traitements transfrontaliers, cet outil permet d’harmoniser les règles à suivre au niveau européen. Ainsi, si les responsables du traitement et les sous-traitants sont uniquement installés au Royaume-Uni, vous n’aurez d’autre choix que de désigner un représentant dans l’Union, comme le stipule l’article 27 du RGPD.6
En ce qui concerne les données envoyées depuis le Royaume-Uni vers la France, c’est le gouvernement britannique qui fixe les règles. Pour l’heure, il a annoncé que les formalités actuelles resteraient inchangées et qu’il n’y aurait donc pas de changements spécifiques. À vous cependant de vérifier régulièrement auprès des autorités britanniques que la situation n’évolue pas.7
Des conséquences contractuelles et fiscales à anticiper
Si vous avez conclu des contrats avec le Royaume-Uni avant le 31 décembre 2020, leur validité juridique n’est pas affectée. Il pourra néanmoins être utile – voire même obligatoire – de les réviser, notamment pour fiabiliser vos relations contractuelles ou si des informations sont désormais caduques (s’il est précisé que le Royaume-Uni est membre de l’Union européenne par exemple).8
Avez-vous fait votre diagnostic Brexit ?
S’adressant à toutes les entreprises françaises, la plateforme Autodiagnostic Brexit vous permet d’évaluer les conséquences sur votre activité de la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. Rapide et simple à utiliser, elle dresse les évolutions à préparer sur 9 thématiques différentes (exportation, importation, services, transport, etc.).
Sur le plan fiscal, il est recommandé de se rapprocher de la Direction générale des Finances publiques, dans la mesure où les conséquences du Brexit vont varier essentiellement selon la nature de votre activité. Les exemples présentés ci-dessous en sont d’ailleurs l’illustration :9
- Vous réalisez des opérations intracommunautaires : vous dépendez désormais des opérations d’importation et d’exportation de biens, vous obligeant notamment à réaliser des déclarations de douane ;
- Vous réalisez des opérations imposables à la TVA : vous devez désormais déclarer et payer la TVA directement aux autorités britanniques ;
- Vous utilisez le mini-guichet TVA MOSS : pour les prestations réalisées avant le 31 décembre 2020, vous devez déclarer et payer la TVA due au Royaume-Uni sur le MOSS avant le 20 janvier 2021. Quant aux prestations fournies à partir du 1er janvier 2021, elles doivent être déclarées selon les modalités fixées par les autorités britanniques.
Pour aller plus loin, rendez-vous sur le portail du gouvernement dédié à la préparation au Brexit ;
Découvrez également nos articles anglophones sur le Brexit :
- Postponed VAT accounting: How it works for businesses importing goods into the UK
- How Sage is helping small businesses thrive in a post-Brexit world
Pour aller plus loin sur les sujets légaux & réglementations, d’autres articles peuvent vous intéresser :
- Dirigeant : vos droits et obligations en période de crise vis-à-vis de vos salariés ;
- CEO : de quels talents faut-il vous entourer ?
Sources :
¹Accord de commerce et de coopération entre l’UE et le Royaume-Uni : une relation nouvelle, et de grands changements – Commission européenne – 2020
²Royaume-Uni : relations économiques bilatérales – Direction générale du Trésor – 2020
³Formalités douanières – Le portail du gouvernement sur la préparation au Brexit – 2020
4Import control system (ICS) Brexit – Formalités douanières sûreté/sécurité obligatoires (ENS) à l’introduction sur le territoire douanier de l’Union (TDU) – Direction générale des douanes et droits indirects – 2020
5Une frontière intelligente pour des conducteurs avertis – Direction générale des douanes et droits indirects – 2020
6Brexit : le RGPD reste applicable au Royaume-Uni jusqu’au 1er Juillet 2021 – CNIL – 2020
7Protection des données – Le portail du gouvernement sur la préparation au Brexit – 2020
8La validité des contrats – Le portail du gouvernement sur la préparation au Brexit – 2020
9Brexit : liste de questions/réponses à destination des professionnels – Direction générale des Finances publiques – 2021